GANACHES, DES ÉMULSIONS À PART...
L'avantage avec les recettes "toutes simples",
c'est qu'elles nous en apprennent bien plus que tous les plats alambiqués,
super complexes et hors de prix ! Ici nos cuisinautes-explorateurs intrépides se sont attaqués à une préparation rebelle : la délicieuse ganache en utilisant le principe de l’inertie thermique pour obtenir une texture parfaite…
La ganache est un système encombré* (très peu d’eau pour
beaucoup de solides et de lipides), une émulsion* (les matières grasses ne
surnagent surtout pas !) et une suspension puisqu’elle contient beaucoup
de fibres insolubles. C’est surtout une irrésistible gourmandise transformant
le mannequin filiforme en Vénus paléolithique et permettant de fabriquer des petites bouchées succulentes, idéales pour Pâques, bien meilleurs que tous les œufs industriels…
LA RECETTE
COMMENT S’Y PRENDRE ?
Infusion. Dans une casserole, assemblez 200 g de
crème liquide à 30 % de mg et quelques filament de safran, si vous en avez.
Portez à ébullition et sortez du feu illico. Couvrez d’une assiette, oubliez 15
minutes. La ganache. Portez à
ébullition à nouveau, ajoutez 2 pincées de sel et sortez de suite du feu,
ajoutez 200 g de chocolat noir à 65% de cacao haché gros. Mélangez jusqu’à
obtenir une masse stupéfiante, homogène et un peu élastique. Versez dans un
récipient, laissez refroidir jusqu’à 3°C, dans le réfrigérateur. Avec une petite
cuillère formez des boulettes, régulières ou pas, oubliez-les à nouveau 20 minutes
dans la congélateur cette fois, sur une assiette, puis roulez-les dans le cacao
amer. Se conserve au frais et se consomme dans la semaine. Que faire avec de
la ganache à part des bouchées ? Garnir des crêpes, des génoise, tremper
des madeleines… ! Alternatives au safran Rien ! Ou un peu de
thé (à filtrer), de la noix de muscade, de l’anis étoilé, à votre bon coeur…
POURQUOI FAIRE AINSI
? Faire d’abord un infusion crème/safran et ne pas tout faire d’un coup ?
Parce que vous êtes perfectionniste et savez que pour que les composés d’arômes
du safran passent dans la crème, il faut que celle-ci ne soit pas trop
« encombré » par les lipides, fibres et autres composants du
chocolat. Mettre le chocolat dans la casserole hors du feu ? Parce
que la chaleur résiduelle de la crème et le la casserole suffisent largement et
évite à la masse de passer au-dessus des 60°C, seuil dangereux au-delà duquel
des déphasages peuvent se produire. Chocolat à 65 % et haché gros ?
Le % correspond à la quantité de crème indiquée dans cette recette. Par ailleurs
ce % garanti une haute teneur en fibres insolubles garantes d’une texture
magnifique ! Hachage ? Afin d’augmenter la surface d’échange
et accélérer la fonte. Les passages au froid ? Afin de raffermir
les bouchées… et parce qu’elles sont bien meilleures glacées.
LE POINT TECHNIQUE
La ganache est une émulsion très riche en lipides et donc
assez fragile, c’est pourquoi, afin de la réussir, il faut faire deux choses.
a) Ne pas faire trop chauffer pour protéger le chocolat… C’est pour cela
qu’on se sert d’un vieux truc de cuisine : la fonte par inertie thermique :
on utilise la chaleur résiduelle de la casserole et de la crème pour faire
fondre le chocolat et non une chauffe directe. b) Bien agiter le mélange
crème /chocolat afin de constituer l’émulsion… C’est comme pour une mayonnaise
dont on se rappelle bien que sans fort « cisaillement » (mélange),
elle ne peut pas se former !
Gauche : ganache réussie.
Les globules de beurre de cacao sont bien individualisés et forment avec l’eau,
une émulsion stable. Par ailleurs, les particules de cacao flottent dans cet
océan ultra gourmand et des fibres insolubles ont gonflé (grâce à l’eau
contenue dans la crème) et donne à l’ensemble la texture continue et comme
élastique voulue. Droite : c’est raté ! On retrouve exactement
les mêmes composants mais totalement désorganisés à cause d’une chaleur
excessive (ou appliquée trop longtemps). Les « liens gras/eau » ont
été endommagés, se sont désolidarisés des globules de gras et ces derniers,
n’étant plus séquestrés, sont remontés et donnent à la ganache cet aspect gras et
luisant tout à fait inopportun. On profite de ces figures pour voir à quel
point la ganache est un système « encombré », c’est-à-dire saturé de
composants solides pour très peu d’eau. D’où toute sa fragilité…
Textes/images et illustrations tous droits réservés Homo Habilis
Tous droits réservés Homo Habilis